SERIAL KILLERS : LES DROGUES DE L
HEMOGLOBINE
Exister par la mort de
l'autre
Il tue pour le plaisir la
première personne qu'il rencontre sur sa route, ouvre le feu dans un
Mac Donald,, mitraille les passants au volant de sa voiture... La
psychose du tueur fou hante l'Amérique : jamais on en aura vu autant
que dans la dernière décennie et ce phénomène pourrait bien
gagner l'Europe. Portrait de ces multirécidivistes du meurtre, dont
certains affichent plus de 200 victimes à leur tableau de chasse.
La psychose du tueur fou hante
l'Amérique : le FBI estime qu'ils sont entre 40 et 200 à s'y
promener en toute liberté, tuant chaque année plusieurs milliers de
personnes. Selon les mêmes sources Ils étaient six fois moins
nombreux il y a 20 ans et quasiment inexistant au 19éme siècle.
Largement surévalué par l'imaginaire médiatique, romans de James
Ellroy et films cultes comme "Le silence des agneaux", ce
phénomène commence cependant à prendre des dimensions alarmantes.
A tel point que dans les grandes
villes Américaines les forces de police exhortent les jeunes femmes
à la plus extrême prudence.
Parmi ces assassins d'un nouveau
genre, apparaissent trois types bien différenciés :
Le Mass Murderer tue
plusieurs personnes (au moins quatre)d'affilée dans un même
endroit,
le
Spree Killer quant à lui
commet plusieurs meurtres dans des lieux différents mais dans un
laps de temps relativement court.
Le Serial Killer tue
pendant des mois voire des années, jusqu'au jour où il est
arrêté. Contrairement aux deux premiers types de meurtriers, qui
sont pour la plupart des psychotiques, vite mis hors d'état de
nuire, le Serial Killer est un psychopathe1,apparemment "sain
d'esprit" et très bien organisé. Outre le nombre de meurtre ce
qui définit le vrai Serial Killer, c'est qu'il tue pour le plaisir
la première personne qu'il rencontre sur sa route. Thierry Paulin,
célèbre pour avoir occis en 1986 une dizaine de vieilles dames,
n'appartient donc pas à cette catégorie, parce qu'il avait des
préoccupations financières. Mais comme le souligne Michel
Bénézech, "les limites sont floues : on trouve une part de
sadisme chez presque tous les meurtriers. Pour Michel Bénézech, Les
dictateurs, guerriers et autres agents secrets sont en fait des
Serial Killers qui ont réussi à donner une apparence
professionnelle à leur goût du sang.
Si les meurtres d'enfants et les
crimes sexuels plongent régulièrement la France en émoi, nos
tueurs hexagonaux n'arrivent pas encore à la cheville de leurs
homologues Américains, la plupart ne frappent heureusement qu'une
fois avant de se faire prendre. Pour Damien Kincher, spécialiste du
meurtre au Ministère de la Justice (Français), " il s'agit
encore d'un phénomène spécifiquement Américain75% des 200 Serial
Killers recensés dans le monde étant originaires de ce pays. "
Mais cela pourrait bien changer
avec l'ouverture des frontières en Europe qui risque selon Michel
Bénézech2 d'entraîner une grande augmentation du nombre de Serial
Killers, qui passeront plus aisément à travers les mailles des
différentes polices nationales.
Cette prédominance Américaine
s'explique aussi largement par les caractéristiques de ce pays. Les
homicides y sont d'une manière générale deux fois plus nombreux
qu'en Europe. Ils ont quasiment triplé au cours de ces trente
dernières années, et s'accompagnent de plus en plus souvent de
violences sexuelles. Selon le Docteur Donald T Lunde de Palo Alto,
collaborateur du FBI, une autre cause du développement de ce
phénomène serait le puritanisme qui s'exerce actuellement aux Etats
Unis. Le Serial Killer est un homme qui étouffe dans ce climat de
répression sexuelle et ne trouve pas d'autre moyen d'expression que
le viol. Il y aurait même une corrélation très nette entre le
conservatisme des Etats et le nombre de crimes sexuels qui y sont
commis.
DES INDIVIDUS TRES
INTELLIGENTS ET PRESQUE NORMAUX
Les Serial Killers ont un profil très différent de celui des autres
criminels : ce sont généralement des hommes proche de la trentaine
de race blanche et d'une grande intelligence. Les études du FBI
montre même que les plus intelligents d'entre eux sont les auteurs
de crimes sexuels. Malgré ses prédispositions notre tueur, en
raison de son caractère asocial, connaît de nombreux échecs
scolaires puis professionnels.
Pierre Chanal est un individu
solitaire mais d'une discipline à toute épreuve et très bien noté
par ses supérieurs hiérarchiques . Qui croirait avoir affaire à un
pervers meurtrier? Pourtant il semble bien que cet adjudant chef soit
à l'origine des disparus de Mourmelon, ces 7 jeunes conscrits dont
on n'a plus retrouvé trace. Reconnu coupable de viol et torture sur
un jeune auto stoppeur Hongrois, son procès est actuellement en
cours. Pour mener leurs forfaits en toute quiétude, les Serial
Killers sont de grands manipulateurs et adoptent souvent une image
séduisante. Pour Stéphane Bourgoin, "rien dans leur
comportement quotidien ne permet de les différencier de vous ou de
moi, jusqu'à ce qu'un banal accident déclenche l'explosion de
violence". Ils inspirent une telle confiance que leurs futures
victimes n'hésitent pas à les suivre, s'apercevant trop tard
qu'elles sont tombées dans la gueule du loup. Quand ils sont
emprisonnés, ce sont souvent des détenus modèles qui travaillent
d'arrache pied à leur future réinsertion et arrivent à
bénéficier de remises de peine pour recommencer à tuer de plus
belle dès leur libération.
UN
INSOUTENABLE DESIR DE VIOLENCE
Pour Michel Bénézech, "la
grande majorité des Serial Killers sont des sadiques sexuels qui ont
le sentiment d'exister par la mort et la domination de l'autre."
Il pense même que tuer provoque en eux une sorte de cataclysme
émotionnel et un obscurcissement de la conscience, un phénomène
s'apparentant à l'orgasme, familiérement appelé le syndrome de
Dracula. Les tueurs en série sont rarement affectés de troubles
mentaux ou de pertes épisodiques du contrôle des pulsions
agressives appelés Troubles Explosifs Intermittents( d'après le
DSMIII, manuel de psychiatrie Américain) .
Lorsqu'ils sont jugés, ils sont
d'ailleurs presque toujours déclarés parfaitement responsables de
leurs actes et condamnés à de lourdes peines.
Pour assouvir leur besoin de
violence, les Serial Killers s'intègrent souvent dans des milieux
professionnels favorisant l'accomplissement de leur vocation. Près
de la moitié d'entre eux ont embrassé une carrière militaire. Un
dixième des Serial Killers sont issus de professions paramédicales,
comme ce cher docteur Petiot qui exerca dans les années 40 ou ces
infirmières de la mort qui distribuent alègrement pentothal et
valium aux malades tardant un peu trop à passer l'arme à gauche.
Michel Bénézech n'y va pas par quatre chemin pour expliquer ce
phénomène : " Une personnalité sadique trouvent dans ces
professions un indéniable exutoire à leur désir de profanation du
corps de l'autre tout en donnant des apparences altruistes à ses
coupables penchants. "
Les pulsions sadiques
s'accompagnent souvent d'un masochisme tout aussi effréné.
L'enquête du FBI nous apprend qu'un tiers d'entre eux se sont
automutilés. Albert Fish, le recordman des Serial Killers avait
ainsi ingurgité une trentaine d'aiguilles de fer qui provoquèrent
un court circuit de la chaise électrique lorsqu'on voulut
l'exécuter. Véritables drogués de l'hémoglobine, n'ayant plus
aucun contrôle sur leurs pulsions, certains Serial Killers sont
même soulagés d'être arrêtés dans leur course vers la mort.
Claude BALIER, responsable du
service psychiatrique de la maison d'arrêt de Varces
(Isére)spécialisé pour les détenus violents, est formel pour dire
que" le sadisme va souvent de pair avec un comportement très
ritualisé", une hypothèse qu'il voit confirmée par le fait
que beaucoup des Serial Killers mutilent leurs victimes, conservent
puis dégustent certains morceaux choisis. Ceux-ci affichent
également une nette préférence pour les armes blanches qui leur
permettent un contact plus rapproché avec la victime. H. H. Holmes,
Serial Killer de la fin du 19éme siècle, s'était même fait
construire un château truffé de pièges pour pouvoir jouir en toute
aisance de la souffrance de ses victimes.
UN COMPORTEMENT QUI PREND SA SOURCE DANS L ENFANCE
Votre enfant non content de faire pipi au lit, aime torturer les
animaux et jouer avec le feu ? Il y a toutes les chances selon les
psychiatres Américains pour qu'il soit un sadique en puissance. On
savait depuis longtemps que le milieu familial jouait un grand rôle
dans le développement d'un individu les parents maltraitants ayant
pour beaucoup été victimes d'abus pendant leur enfance. Claude
Balier nous apprend que c'est ce même milieu familial qui favorise
le développement de tendances sadiques.
La plupart des serial killers
interrogés par le FBI ont connu dans leur enfance de profondes
carences affectives qui les ont conduits à s'isoler totalement de la
société et à se plonger dans une intense vie fantasmatique. Plus
de la moitié d'entre eux proviennent d'une famille monoparentale et
ont été victimes d'abus sexuels pendant leur enfance. Pour fuir ce
contexte défavorable, selon le professeur Stanton E. Samenow
psychaitre dans un hopital pénitentiarie de Washington, les Serial
Killers sont "depuis leur âge le plus tendre à la recherche
d'activités qui les électrisent., se trouvant très vite pris dans
une escalade progressive de leurs forfaits." Pour Michel
Bénézech se fait fort de déduire le milieu familial dans lequel a
grandi un meurtrier d'après son comportement : s'il a eu une mère
malade mentale, il aura toutes les chances de devenir un tueur
psychotique. S'il n'a pas connu son père, il aura plutôt tendance
à se transformer en psychopathe.
Stéphane Bourgoin explique cette
envie de domination par un profond sentiment d'impuissance dont ils
veulent se venger sur des victimes expiatoires : la moitié d'entre
eux avouent ne pas avoir connu de vie sexuelle "normale"
avant leur passage à l'acte et ils ne peuvent souvent faire l'amour
qu'avec des partenaires réduits à l'impuissance, évanouis ou
morts.
Leur obsession morbide résulte
souvent d'un traumatisme ou d'une grande déception survenue dans la
prime enfance ou dans l'adolescence. Ted Bundy, exécuté en 89 et
soupçonné d'avoir tué une cinquantaine de jeunes femmes, entreprit
sa sanglante croisière à la suite d'une déception amoureuse.
Certains ont cependant des motivations plus prosaïques; Stéphane
Bourgoin dans son livre sur les tueurs en série rapporte ainsi le
cas du Mad Bomber qui terrorisa New York entre 1940 et 1956 en
déposant une trentaine de bombes, voulait se venger du licenciement
abusif dont il avait été victime.
MEGALOMANIE ET DESIR MYSTIQUE
Stéphane Bourgoin insiste sur le
fait que les Serial Killers ont besoin de voir leur puissance
reconnue.
D'autres Serial Killers se sentent
investi de la mission de purifier le monde de tous les individus
qu'ils considèrent comme dégénérés; aussi n'est-ce pas un hasard
s'ils s'attaquent en priorité aux symboles de la décadence des
moeurs : prostituées et homosexuels... Ils veulent se venger de la
société qui a détruit leur innocence enfantine. On a même vu
fleurir aux Etats Unis quelques sectes de Serial Killers pratiquant
des cultes sataniques et ayant une idéologie plus ou moins néo
nazie. Celle de Charles Manson fit grand bruit à la fin des années
60 en assassinant Sharon Tate. Au début de la décennie suivante une
société secrète de militants noirs assassina une soixantaine de
personnes de races blanche à San Francisco. Mais une question se
pose alors : S'agit-il encore de Serial Killers ou de terroristes?
La société Américaine faite de bruit, de violence télévisée sur
fond de sexe et de racisme apparaît comme un terreau favorable à de
telles conduites. Ce n'est pas la première fois qu'on aura vu les
héros du petit écran et autres Starky et Hutch faire des émules
chez des individus à la recherche d'émotions fortes!!
LES METHODES DU FBI
Les Serial Killers représentent une menace d'autant plus sérieuse
qu'ils sont très difficiles à appréhender : ils n'ont la plupart
du temps aucune relation connue avec leurs victimes et qu' ils sont
très mobiles, voyageant d' Etat en Etat. Et lorsqu'on les arrête
pour un meurtre, il est très difficile d'apporter la preuve de leurs
autres forfaits. Certains Serial Killers sont restés en liberté
pendant des années, aucun lien n'ayant pu être établi entre leurs
différents crimes.
Dès qu'ils sont libérés, la
plupart des Serial Killers recommencent aussitôt à tuer. Ce qui
fait penser à la plupart des psychiatres qu'ils sont insoignables et
ne perdront jamais leur goût pour la chair fraîche.
Pour mieux traquer les Serial
Killers le FBI a créé en 1985 le National Center for the Analysis
of Violent Crimes(NCAVC) qui est un des plus bels exemples de police
scientifique. Il dispose de deux outils permettant d'identifier les
Serial Killers, le Violent Criminal Apprehension Program (VICAP) et
les portraits robots psychologiques.
Le VICAP est un programme
d'ordinateur destiné à collecter des données sur les crimes
violents. Chaque enquêteur local remplit un questionnaire qu'il
envoie ensuite au National Center, celui-ci est alors rentré dans la
base de données et comparé à l'ensemble des autres crimes non
élucidés afin de retrouver les crimes ayant les mêmes
caractéristiques. Des réunions sont alors organisées entre les
forces de police des Etats dans lesquels ils ont été commis.
Le FBI recourt également à son
"Behavioral Science Unit" , formée de psychiatres et de
spécialiste en criminologie, pour dresser le portrait psychologique
des meurtriers non-indentifiés. Cette unité procède par ailleurs
à l'interrogation systématique de tous les meurtriers arrêtés
afin d'en déduire des lois psychologiques : Lorsque la victime est
rendue méconnaissable, cela permet de présumer d'une connaissance
préalable entre celle-ci et son assassin. Trop de propreté indique
que son auteur est sorti d'un hôpital psychiatrique depuis moins de
six mois.
Plus de mille meurtres lui sont
soumis chaque année et dans 77% des cas le portrait s'est révélé
exact. Depuis quelques années des programmes équivalents existent
en Angleterre ou au Canada, pays où les collaboration entre
policiers et psychiatres sont beaucoup plus anciennes qu'en France.
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