SA
COMPLEXITE
UNE DISCIPLINE
Le phénomène criminel est connu
de tous. Les journaux et la télévision attirent quotidiennement
notre attention sur des meurtres, des vols avec violence, des
affaires de femmes battues ou des trafics de drogues. Mais cette
connaissance reste anecdotique. Le criminologue va au-delà du fait
divers pour poser la question criminelle en toute rigueur.
Quelle est la véritable nature du
crime?
Qui sont les délinquants?
Quelles sont les causes du crime?
Comment le prévenir?
Quelle est l'efficacité des mesures policières, judiciaires et
pénales dans la lutte contre le crime?
La criminologie est une discipline
qui se définit par son objet: d'abord le crime et ensuite la
manière dont on y réagit.
Certains criminologues sont
surtout intéressés par le crime lui-même. Les questions qu'ils se
posent portent sur les vols et les voleurs, sur les meurtres et les
meurtriers, sur les fraudes, sur le vandalisme...
Pourquoi devient-on délinquant? Pourquoi la criminalité
augmente-t-elle durant certaines années et pourquoi diminue-elle
durant d'autres périodes?
D'autres criminologues font porter
leur attention sur la réaction de la société au crime. Ils veulent
savoir pourquoi et comment certains actes en viennent à être
définis comme crime.
Par exemple, pourquoi le trafic de
drogue est-il un crime aujourd'hui alors qu'il n'en était pas un
autrefois? Ils s'interrogent aussi sur la manière dont le code
criminel est appliqué.
Enfin, ils jettent un regard critique sur le fonctionnement des
organisations policières, des tribunaux criminels, des prisons et
des autres mesures pénales.
La criminologie est une
discipline complexe,
premièrement parce qu'elle est
multidisciplinaire et deuxièmement parce qu'elle est à la fois
théorique et appliquée.
En tant que discipline
théorique, la criminologie va chercher une bonne partie de ses
informations, de ses concepts et de ses méthodes dans les sciences
humaines, dans le droit, dans l'histoire et dans le philosophie. Elle
puise tout particulièrement dans le sociologie, la psychologie et le
droit. Ses méthodes de recherche et d'analyse s'apparentent beaucoup
à la méthodologie couramment utilisée dans les sciences sociales
et en psychologie. Elle est une discipline - carrefour vers laquelle
convergent toutes les connaissances sur le phénomène criminel. La
criminologie est aussi une discipline appliquée. La formation que le
criminologue a reçue lui permet, par exemple, de décider si une
libération conditionnelle peut être accordée à tel détenu ou,
autre exemple, de proposer un plan d'action pour faire face à une
épidémie de vols d'automobiles qui sévit dans tel parc de
stationnement.
Pour résoudre de tels problèmes, il faut savoir bien poser un
problème criminel; il faut savoir recueillir et traiter
l'information nécessaire et il faut avoir réfléchi aux enjeux
éthiques et politiques que le criminologue élabore des stratégies
de prévention et de gestion du risque qui tiennent compte de la
dynamique du crime et de réaction sociale.
CHAMPS D APPLICATION
LA CRIMINOLOGIE CLINIQUE
C'est l'étude du délinquant comme personne dans le but de
le comprendre, de prévenir sa récidive et de l'aider. Qui est le
délinquant? Comment l'est-il devenu? Que deviendra-t-il? Le
diagnostic criminologique a pour but de décrire le contrevenant,
d'estimer les risques qu'il ne récidive puis d'élaborer un plan
d'intervention approprié. La criminologie clinique étudie aussi
l'intervention: le choix d'une mesure qui soit adaptée à un type
particulier de délinquant, la mise en oeuvre de cette mesure et
l'évaluation de son efficacité
LES PEINES, LES DECISIONS PENALES ET LES MESURES PENALES
Par définition, le crime est un acte punissable. Il importe
au criminologue d'étudier les peines infligées aux délinquants.
A côté de l'incarcération et de l'amende, on trouve aussi la
surveillance dans la communauté, les travaux bénévoles de nature
compensatoires, le placement dans un centre d'accueil et l'obligation
de réparer le dommage subi par la victime.
Comment choisit-on une mesure pénale plutôt qu'une autre?
A partir de quels critères? En vue de quoi? Les objectifs de la
sentence sont variés: intimider la délinquant ou ses semblables, le
réhabiliter, l'empêcher de nuire, le faire payer pour son crime,
etc. Ces buts sont-ils réalisés? Est-il justifié de punir les
délinquants? Ce chapitre de la criminologie souléve de difficiles
problèmes théoriques, philosophiques et politiques
LA PREVENTION DU CRIME
Les sociétés ne luttent pas
contre le crime seulement par des mesures réactives ou répressives,
elles recourent aussi à des mesures "proactives" ou
préventives. Les citoyens et les pouvoirs publics interviennent de
manière non punitive pour détourner les jeunes gens de la
délinquance et pour limiter les occasions de crime. On fait obstacle
au développement de tendances délinquantes des individus
essentiellement en s'assurant que les enfants et les adolescents qui
risquent de verser dans le crime soient mieux encadrés, mieux
protégés et mieux éduqués qu'ils ne le sont. C'est ainsi que,
dans certaines écoles, les élèves qui ont des difficultés
d'apprentissage et de comportement jouissent d'un encadrement
intensif aussi bien dans leurs activités académiques que durant
leurs loisirs.
La prévention
"situationnelle"
procède d'une toute autre logique. Elle repose sur le constat que
les décisions délinquantes sont influencées par les circonstances
immédiates dans lesquelles elles sont prises. Imaginons, par
exemple. qu'un garçon ait envie de voler une automobile pour
"faire un tour" avec ses amis. Il passera presque
certainement à l'acte sera s'il en vient à passer près d'une
voiture sport dans laquelle se trouvent les clefs d'allumage et il
n'en fera probablement rien si tous les véhicules qui le tentent
sont protégés par de bons anti-vols. Ce type de prévention
consiste à susciter des habitudes et à implanter des systèmes de
protection qui réussiront à persuader les délinquants potentiels
que les délits envisagés sont trop difficiles, trop risqués ou
trop peu profitables
LES DEBATS EN CRMINOLOGIE
La criminologie n'est pas un champ
où règne le consensus. Certains criminologues s'efforcent de s'en
tenir aux faits et ils s'interdisent de porter des jugements de
valeur; d'autres affirment qu'il faut s'engager, prendre parti,
dénoncer les injustices et les abus. Certains pensent qu'il faut
viser avant tout l'efficacité dans la lutte contre le crime;
d'autres croient que la justice prime et qu'il faut rendre à chacun
ce qui lui est dû, même quand la solution la plus juste n'est pas
la plus efficace.
Certains pensent que les
contrevenants sont les victimes des circonstances et qu'il faut les
traiter avec compassion, humanité et générosité; d'autres jugent
qu'il faut faire subir aux criminels le châtiment qu'ils méritent
et leur imposer la mesure qui assurera la défense de la société.
Certains pensent qu'un droit
pénal démocratique contribue à la justice et à la sécurité du
public tout en garantissant les droits et les libertés; d'autres
pensent que le système pénal produit plus de souffrance qu'il n'en
épargne et qu'il faut trouver une réponse plus civilisée à la
question criminelle. Dans la communauté des criminologues, cette
diversité d'opinions alimente une controverse qui est à l'image du
débat qui renaît sans cesse dans les sociétés démocratiques
autour des choix se politiques sociales et pénales.
Bien que la criminologie
n'échappe pas à la controverse, elle reste un savoir rigoureux sur
le criminel, sur le crime, sur la criminalité, sur les peines, sur
la victime, sur la sécurité privée, sur la police et sur la
prévention. Ce savoir peut servir à tous ceux qui veulent apporter
une contribution
Les secteurs dans lesquels travaillent les criminologues sont
étonnamment diversifiés et nombreux: prisons et pénitenciers,
libération conditionnelle et probation, centres d'accueil de
réadaptation et centres de protection de l'enfance et de la
jeunesse, foyers de groupe pour les jeunes toxicomanes et maisons de
transition pour les ex-détenus, centres d'aide aux victimes d'actes
criminels, ministères, services de police, municipalités... Dans
tous ces milieux, les criminologues déploient une activité aux
facettes multiples: l'intervention clinique, la gestion de
programmes, l'animation, la consultation, l'analyse, la recherche,
l'enseignement...
L'INTERVENTION AUPRÈS DES DÉLINQUANTS ADULTES
La détention
Dans les milieux de détention,
les criminologues ont la responsabilité d'évaluer les délinquants
au début de leur séjour. Ils font un bilan de leur histoire sociale
et familiale, ils analysent leurs conduites criminelles (les motifs,
les circonstances, la gravité des délits et la nature des
récidives). L'évaluation permettra d'orienter les détenus vers des
programmes appropriés à leurs besoins sans pour autant menacer la
sécurité du public: formation académique, travail, thérapie dans
un établissement à sécurité minimale, moyenne ou maximale.
Le travail du criminologue en
milieu carcéral comporte aussi le support aux détenus pour les
aider à purger leur sentence dans la perspective d'un retour
éventuel dans la société. Les criminologues auront également à
évaluer la capacité d'un détenu à bien fonctionner lors d'une
libération éventuelle.
L'INTERVENTION AUPRÈS DES JEUNES
Les criminologues interviennent
aussi auprès des jeunes qui commettent des délits et auprès de
ceux que la société doit protéger parce qu'ils sont gravement
négligés, ou victimes d'abus ou encore parce que les parents se
déclarent impuissants devant leurs troubles de comportement. Ces
professionnels sont engagés par les centres de protection de
l'enfance et de la jeunesse, par les centres de réadaptation, par
les maisons d'hébergement ou par les foyers de groupe.
Dans les centres de protection de
l'enfance et de la jeunesse, la plupart des criminologues travaillent
auprès des jeunes contrevenants. Outre les délits qu'ils
commettent, ces derniers sont souvent en conflit avec les parents;
ils ont des difficultés scolaires et il leur arrive de consommer de
la drogue. Ces jeunes ont des besoins d'encadrement et de support.
Ils auront à se conformer à une ordonnance de probation décidée
par le tribunal de la jeunesse, à effectuer des travaux
communautaires, à participer à des rencontres de conciliation avec
les victimes, à payer une amende ou encore à être placés en
famille d'accueil. Les criminologues seront appelés à évaluer les
adolescents qui font l'objet d'une de ces mesures et à les orienter
vers des services adaptés à leurs besoins
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