RACHID O.


   
Plusieurs vies

Plusieurs vies
de Rachid O
152 p., Gallimard, 20 F

«Il était une fois un policier qui suivait les jolis garçons mais il était si nigaud que, pour les aborder, il leur demandait leurs papiers.» Ainsi pourrait commencer un des contes des mille et une vies qu'écrirait un Arabe contemporain, plein d'expérience. Cet écrivain existe. Marocain aujourd'hui âgé de vingt-huit ans, révélé au public par L'enfant ébloui, il signe Rachid O. Dans son deuxième livre, modestement intitulé Plusieurs vies, il nous fait traverser, sur ses pas, beaucoup d'existences. Parlant à la première personne - ce n'est pas un roman -, il nous dit son goût pour les hommes, très souvent récompensé. Il nous fait partager ses rencontres de Rabat, Tanger, Marrakech, Mulhouse, Zurich. Il attire dentiste, acrobate, clochard, violoniste, footballeur, masseur de hammam, père de famille à la retraite, jeune drogué hétérosexuel ou policier nigaud évoqué plus haut.

Du cimetière où repose Genet aux laveries parisiennes, qui lui font découvrir la «vie célibataire», il aimante des inconnus. Dont certains se disent prêts à lui consacrer le reste de leurs jours. Et parfois il se met à les aimer. Ce qu'il découvre ou apprend est parfois tragique - sida, assassinat -, mais il y a en lui quelque chose de souverain qui lui interdit tout pathos. Le français n'est pas sa langue natale. Il le manie avec le soin qu'on apporte aux instruments délicats et obtient de la belle et bonne prose d'artisan. Posées, pudiques et directes à la fois, les histoires d'O - où figurent deux faux oncles - se distinguent agréablement de tant de souvenirs de dragueurs frénétiques et de soupirants transis!